Tituba, ma sorcière bien-aimée

Tituba, ma sorcière bien-aimée

S’il y a bien un livre que j’ai aimé lire, c’est bien Moi, Tituba sorcière…. Et s’il y a bien un livre que j’aurais aimé écrire, c’est également celui-là. Mais c’est sûrement prétentieux de ma part de vouloir égaler Maryse Condé. Je pourrais même dire la Maryse Condé, puisque cette écrivaine guadeloupéenne est un monument de la littérature française. Récemment récompensée du prix Nobel de littérature alternatif, elle a une bibliographie impressionnante : pas moins d’une trentaine de romans, d’essais et de pièces de théâtre. Chacun de ses textes, depuis ceux écrits à l’époque où elle n’était qu’étudiante sur les bancs de la Sorbonne, à aujourd’hui, du haut de ses 80 ans, sont consacrés à sa réflexion sur l’Afrique et les Antilles. Parce qu’il faut préciser que sa vie, autant que sa carrière, sont tournés vers un militantisme qui vise au développement de l’Afrique… Oui vraiment belle à voir cette Maryse Condé.
Son talent et sa pensée politique sont pour une grande partie condensée dans Moi, Tituba sorcière… Avec ce roman, Maryse Condé s’empare d’un personnage historique qui a vraiment existé pour le modeler au gré de son imagination. Sous sa plume, Tituba, est une belle jeune femme, née du viol sordide de sa mère Adena sur un bateau négrier. Elle aurait pu mener l’existence classique de toutes jeunes esclaves sur les plantations de la Barbade, mais le sort la conduit à devenir l’élève de Man Yaya, la guérisseuse qui vit en pleine forêt. Sous son aile, elle apprend à communiquer avec les morts, qu’elle est capable de voir, mais aussi à utiliser les pouvoirs des plantes et des éléments pour… Guérir. Et oui pour son grand malheur, bien qu’elle soit vite crainte par tous en tant que sorcière, les pouvoirs de Tituba sont essentiellement inoffensifs. Elle n’échappe donc pas à la violence et aux soucis que subissent ses frères et ses sœurs de condition. Pire encore, elle est bel et bien une femme faite comme une autre ce qui est la cause de la plupart de ses tribulations… Tituba aime les hommes, plus que sa liberté même, mais comme le lui reproche sa mère s’il y a bien un don qu’elle n’a pas, c’est celui de choisir ses hommes. Plus que l’histoire d’une sorcière qui est persécutée, c’est l’histoire d’une jeune femme noire dont le désir d’amour et de paix n’est pas à sa place dans cette période de barbarie.
Amours, trahison, magie noire, violence… l’histoire de Tituba est vraiment passionnante à lire et riche en rebondissements. Les descriptions sont chargées d’images inattendues et vibrantes. Tout comme les dialogues agrémentés du parlé créole, de contes et de prières païennes. Maryse Condé parvient vraiment à faire revivre cette période. Le fouet qui siffle et qui claque sur le dos, le mépris et la haine ordinaire ancrée dans les mentalités, les tortures… Tout est dit et ça commence d’entrée de jeu dès les premiers mots du roman. L’écrivaine met également en scène avec brio la folie des puritains. Mais ce que je retiens en particulier, c’est sa capacité à nous plonger dans l’univers invisible des esprits. Un monde autre qui rend la réalité plus supportable pour l’héroïne, mais aussi pour le lecteur. Est-ce pour cela que ce récit d’esclavage me laisse un si bon souvenir ? Probablement. 

Amy

Écrivaine et Conceptrice de La Femme en Papier

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